Passionné d'aventures en montagne depuis mon plus jeune âge, je vous propose de découvrir ce site internet dédié à mes périples en altitude. Vous y trouverez les récits, photos, et vidéos de toutes les ascensions que j'ai réalisées à ce jour dans le monde entier.
CARRANTUOHILL (1038 m) - Traversée
Juillet 2022 - Macgillicuddy's Reeks, Irlande
Jour 1 : Traversée du Carrantuohill (1038 m)
Récit de l'expédition
Galerie photos
Carrantuohill est la plus haute montagne d'Irlande, avec une modeste altitude de 1038 mètres. S'élevant au sud du pays, dans le comté de Kerry, pas loin de l'océan Atlantique, elle est la cime centrale de la chaîne des Macgillicuddy's Reeks. Son sommet est surmonté d'une croix en métal de cinq mètres de haut.
La montée s'effectue en général par le versant nord-est, le long du vallon de la Sorcière (Hag's Glen), puis par l'abrupte Échelle du Diable (Devil's Ladder) jusqu'au col entre Carrantuohill et Cnoc na Péiste puis jusqu'au sommet. L'itinéraire est devenu plus dangereux ces dernières années en raison de rochers instables et de la fréquentation. L'ascension ne requiert aucun équipement spécial, mais elle est tout de même destinée aux randonneurs avertis car certains passages sont escarpés.
Autour de la montagne se dessinent plusieurs vallées verdoyantes, toutes décorées de magnifiques lacs, forêts et étendues de landes rousses. Plus haut, les abords du sommet sont plutôt constitués de roches, de murs abrupts et de pierres. La météo irlandaise, humide et capricieuse, peut avoir une incidence importante sur la randonnée, notamment dans les passages accidentés et raides.
L'Irlande, aka l'île d'Emeraude, est un pays d'exception avec ses paysages sauvages et rudes, ses siècles d'Histoire, ses habitants au cœur généreux et ses traditions ancestrales. Cette terre celte, authentique, fascine à coup sûr le cœur de tout voyageur. Elle n'est en revanche guère réputée pour ses reliefs et pourtant, à y regarder de plus près, elle a de quoi faire le bonheur des randonneurs ! Plusieurs massifs offrent de séduisants parcours. Le secteur le plus attirant est situé au sud du pays, dans le comté de Kerry. C'est là que s'élèvent les plus hauts sommets. 1000 mètres d'altitude, à peine. C'est peu, mais l'ensemble a un véritable caractère montagneux.
Départ à Cronin's Yard, dans le cœur du Kerry
Nous nous équipons légèrement et partons sur l'excellent sentier qui monte en douceur dans Hag's Glen (le vallon de la Sorcière). Un pont métallique permet de franchir la rivière Gaddagh et de continuer son chemin tranquillement vers le sud. Plus loin il faut sauter de pierres en pierres pour traverser à nouveau le torrent. Au bout d'une heure environ nous atteignons le Lough Callee.
Je prends la direction de l'ouest, contourne le Lough Gouragh aux merveilleux reflets, et commence à m'élever rapidement, dépassant d'autres randonneurs en coup de vent. Par endroits le tracé est ardu et exposé. Il y a même un petit mur à escalader, relativement facile (II), mais pas non plus à la portée de n'importe qui. D'autant que le terrain est raide, ce qui peut impressionner les débutants. Je me hisse vite au "first floor", un premier replat qui est le bienvenu car il me permet de reprendre mon souffle. Je laisse sur ma gauche l'itinéraire des Heavenly Gates et garde le cap initial. Après un raidillon vient un second replat, sous-entendu un second répit. Encore un coup de rein et voilà enfin le troisième et dernier étage, à 750 mètres d'altitude, sur lequel je découvre le Lough Cummeenoughter, un merveilleux étang niché dans son écrin minéral. Je quitte alors le tracé classique du O'Sheas Gully et m'engage sauvagement sur la droite. Car le Carrantuohill ne me suffit pas, je souhaite également gravir ses voisins, Beenkeragh et Caher. L'idée est claire : enchaîner les 3 sommets irlandais dépassant les 1000 mètres d'altitude.
Eclairage sur la face nord du Carrantuohill
L'arête entre ces deux toits de l'Irlande demande un minimum de concentration. Il ne faut pas tomber, alors pas d'excès de confiance. Après un passage par The Bones (956 m) je rejoins l'itinéraire classique au niveau d'un col. Reste à gravir une centaine de mètres, sur un sentier efficace et très fréquenté. Je croise quelques locaux et discutent avec eux, dans un anglais approximatif (je ne l'ai guère travaillé depuis les bancs de l'école !). Ils me certifient que les conditions météo sont exceptionnelles aujourd'hui. Il est très rare d'avoir un ciel dégagé sur cette montagne qui est attenante à la côte sud-ouest du pays, c'est-à-dire à la merci des fureurs de l'Atlantique Nord. Je termine à grand pas, haletant, jusqu'à la cime du Carrantuohill (1038 m), point culminant de l'Irlande, sur laquelle une grande croix métallique a été érigée.
Je poursuis ma boucle, maintenant en direction du sud-ouest. Ce versant est moins abrupt et j'en profite pour courir un peu, heureux comme un gosse. Je m'engage sur une jolie crête herbeuse sur laquelle bêlent quelques moutons. C'est là un petit détour qui me mène au Caher (1001 m). J'en profite même pour pousser le vice jusqu'au Caher West Top (973 m), situé à quelques minutes. Une manière de compléter le circuit et de découvrir un autre point de vue sur le secteur, en s'écartant légèrement des sentiers fréquentés. Dans ce genre de décor la solitude a du bon. En plongeant le regard je me rends compte que dans ce massif chaque vallon renferme de superbes lacs, tous plus beaux les uns que les autres. Un paradis de la randonnée en quelque sorte, qu'il faudrait passer plusieurs jours à explorer.
Plongée lacustre depuis le Caher
C'est avec bonheur que je retrouve les prairies accueillantes qui bordent le Lough Callee. Il ne me reste qu'à descendre tranquillement au parking par le large et confortable sentier. J'y retrouve Aurélie, absorbée par un match télévisé de football gaélique (dont je n'ai toujours pas compris les règles !) alors que l'après-midi touche à sa fin.
Désormais il est temps de poursuivre notre périple sur les magnifiques terres d'Irlande. Il reste encore tant de choses à découvrir : la presqu'île de Dingle (ne ratez pas l'emblématique distillerie), l'île de Skellig Michael (un incontournable pour les fans de Star Wars, dont je fais partie !), les falaises de Moher (impressionnantes mais surpeuplées), sans oublier les lacs du Connemara (chers à qui vous savez)...
Durant les premiers jours de notre périple nous avons exploré Dublin, la capitale, alternant entre visites touristiques (la bibliothèque du Trinity College est stupéfiante) et pauses Guinness dans le quartier festif de Temple Bar. Notre voyage nous a ensuite conduit au parc national de Wicklow, où nous avons réalisé une petite randonnée, puis nous avons découvert Kilkenny, le Rock of Cashel, Cork, Kinsale... La météo irlandaise a la réputation d'être capricieuse, mais ce mois de juillet fait exception : il est plutôt chaud et ensoleillé. Des habitants nous ont même parlé de "canicule", un terme qu'il faut relativiser à cette latitude : il fait 25° actuellement, bien loin des suffoquants 40° qui s'abattent sur la France. Nous choisissons la meilleure journée pour nous lancer à l'assaut des Macgillicuddy's Reeks, le chaînon où se trouve le Carrantuohill, point culminant du pays.
Depuis Killarney une route étroite et sinueuse, bordée d'une végétation dense, nous conduit à Cronin's Yard, point de départ de la randonnée à seulement 150 mètres d'altitude. Il y a un grand parking ainsi qu'une petite boutique faisant office de restaurant. Et déjà beaucoup de monde en ce dimanche radieux, ce qui n'est pas surprenant car nous nous lançons sur la plus fameuse des balades irlandaises.
Beaucoup de randonneurs s'arrêtent ici, dans ce cadre enchanteur, pour profiter des abords du lac. C'est également le cas d'Aurélie, ma compagne. Nous attendons un heureux évènement et par prudence elle n'ira pas plus haut. Il faut dire que la suite de l'ascension est plus corsée : le Carrantuohill est une véritable pyramide, escarpée de tous côtés. Pas si simple pour un "1000" ! Plusieurs itinéraires mènent vers son sommet, ce qui m'offre la possibilité d'effectuer une belle traversée !
Commençons par le Beenkeragh, qui est sans doute le plus compliqué des trois. "Compliqué" est toutefois un bien grand mot, car des parcours exigeants, j'en ai vu d'autres ! Après ma montée improvisée en pente raide je dois parcourir l'arête finale. Cela nécessite de poser un peu les mains et surtout de prendre garde où on pose les pieds. Un instant d'inattention et l'on peut trébucher, ce qui aurait de fâcheuses conséquences compte tenu de l'inclinaison des pentes. Depuis le Beenkeragh (1008 m) la vue est superbe sur la face nord du Carrantuohill. En hiver il doit y avoir quelques voies techniques à réaliser dans ce coin, et j'imagine bien les alpinistes irlandais venir s'entraîner ici. Je distingue des randonneurs sur son sommet, et j'ai déjà hâte de les rejoindre !
Le ciel s'est un peu voilé mais le panorama reste somptueux. Visuellement il se dégage de ces montagnes irlandaises une forme de symbiose entre les éléments, puisque le vert se marie parfaitement avec les couleurs du ciel et de la roche. Le Kerry resplendit. Tout autour de moi les reliefs adoucis invitent à la balade. Sur cette chaîne des Macgillicuddy's Reeks en particulier, qui s'étire en un chapelet de cimes. Le collectionneur de sommets que je suis y voit forcément l'opportunité de les gravir l'un après l'autre, en dessinant un parcours d'exception. Pour ça on verra plus tard. Déjà, savourons le moment présent.
Il est désormais temps de revenir vers le parking. Pour cela je commence par traverser le vaste flanc sud du Carrantuohill pour rejoindre le large col de la voie normale. J'hésite un instant à prolonger mon parcours à toute crête, en direction du Cnoc na Péiste, quatrième plus haute montagne du pays. Mais le chemin est long : il faudrait enchaîner montées et descentes pendant plusieurs heures pour atteindre cette cime. Or il est déjà tard, environ 16h, et Aurélie m'attend plus bas. Alors tant pis, ce sera (peut-être) pour une prochaine fois.
Je me tourne donc vers la descente directe, particulièrement abrupte, appelée Devil's Ladder. Traduisez "l'échelle du diable". Le nom, exagéré certes, est tout de même évocateur : il s'agit d'un couloir sinistre encombré de roches très instables. La fréquentation rend ce passage dangereux car on n'est jamais à l'abri d'une chute de pierre déclenchée par un autre randonneur. Certains préfèrent d'ailleurs éviter ce tronçon en empruntant un sentier plus facile, un peu à l'est, mais qui requiert du dénivelé supplémentaire. En ce qui me concerne je suis habitué à ce type de terrain malcommode, mais je dois avouer que je ne garderai pas un bon souvenir de cet entonnoir dont la descente est très pénible.
Après une collation nous quittons le massif, très heureux de cette randonnée sur les plus exaltantes montagnes du pays. Nous avons été gâtés par la météo qui, ne l'oubliez pas, peut faire de cet endroit paradisiaque un véritable enfer, et ça en l'espace de quelques heures. Par temps humide le terrain s'averera très glissant, et l'orientation sera délicate en cas de mauvaise visibilité. Gardez à l'esprit qu'ici les montagnes sont à l'image des Hommes : elles ont du caractère !